Epave de la Major à Six Fours les Plages
L’épave de la major repose sur un fond de 93 mètres au large de Sanary le Brusc. La Major était une drague non motorisée, avec un ponton sans moteur et une benne.
L’épave a été retrouvée par Jean Pierre Joncheray, Gérard Loridon et le capitaine André Durand le 8 Aout 2003, à 2500 mètres du Rouveau.
La Barge a coulée le 20 Mars 1965.
Je savais que ce n’était pas l’épave du siecle: on n’a pas toujours la chance de trouver un Guarani sous la mer ! (Voir « 80 épaves a Marseille et dans sa région »).
Cependant, pouvoir lui donner un nom, faire revivre ses derniers instants, allait me procurer des émotions propres à prolonger le moment fort de la découverte.
Personne ne connaît mieux la baie de Sanary et les abords du cap Sicié que Gérard Loridon, la mémoire vive des scaphandriers, la
cheville ouvrière du musée Frédéric Dumas. C’est tout naturellement vers lui que je suis allé « a la pêche aux renseignements ».
Le naufrage de La Major a lieu le 17 mars 1965
André Durand, capitaine du remorqueur Phocéen de la Société Provençale de Remorquage, inspecte minutieusement la drague La Major ainsi qu’une barge à clapet amarrée à couple. Ces engins de servitude sont complémentaires: la drague, avec sa benne preneuse, cure les fonds de port et remplit
labarge à clapet.
Cette barge encore appelée poétiquement « Marie‑salope », une fois pleine, est ractée en mer puis vidée en onvrant les portes à clapets. Le Phocéen est arrivé le matin même et doit ramener à Marseille La Major qu’il a livrée à Bastia le 27 janvier dernier pour participer aux travaux de réaménagement portuaire. Il doit aussi convoyer la barge, qu’il laissera à Monaco.
Les papiers sont en règle, tout semble en parfait état de navigation, les panneaux sont condamnés, le matériel et la flèche de drague bien arimés.
Il est prévu de partir dans la soirée mais un avis de coup de vent fait remettre l’appareillage au lendemain.
Le 18 à 12h301 le train de remorque quitte Bastia et prend la mer, Major en tête. Les conditions météo étant redevenues satisfaisantes,
le capitaine Durand met le cap sur Monaco.
Le 19 à 8h, il mouille en baie de Roquebrune et libère la barge à clapet qui est aussitôt prise en charge par une vedette. La Major est à nouveau inspectée, la drague et les pattes d’oie vérifiées. Tout est en ordre : 270 mètres de filin d’acier et les 50 mètres de nylon reliant le filin aux pattes d’oie de la drague, qui jouent le rôle d’amortisseur. Le remorqueur file ses 6 noeuds; à 12h 05, il double le cap Ferrat et, à 22h30, la petite passe de
Porquerolles, avec un léger mistralou force 3 dans le nez et une houle résiduelle due au mauvais temps des jours précédents. Prudent, le capitaine diminue son allure et se rapproche de la terre pour être plus à l’abri. Depuis la tombée de la nuit, l’homme de bossoir allume régulièrement un projecteur pour surveiller le comportement de la drague. Enfin, le 20 mars, à 0h55, le cap Sicié est dépassé. Il ne reste plus qu’a filer tout droit vers La Ciotat, contourner l’archipel de Riou et rentrer dans la rade de Marseille, le bout du voyage.
La houle tombe progressivement puis s’amortit complètement. La mer est belle lorsqu’à 1h45, à 1,5 mille par le travers du Grand Rouveau, l’îlot le plus occidental de l’archipel des Embiez, le feu vert de la drague disparaît brutalement. Celle-ci chavire, quille en l’air. Le remorqueur fait aussitôt route vers le phare du Rouveau pour tracter la drague et tenter de l’échouer sur des petits fonds. Mais à 2h15, La Major se mâte et elle coule à pic 5 minutes plus tard.
Dans une manoeuvre désespérée, le capitaine Durand pousse les moteurs à fond dans l’espoir de tracter encore la drague, mais voyant que le remorqueur n’avance plus, il se résigne et manœuvre pour récupérer au maximum la remorque en la treuillant avant de la couper.
Il prévient les autorités par radio, reprend la route à 3h et s’amarre au quai des Anglais à Marseille à 5h45. André Durand m’a confirmé ce qu’il avait écrit dans son rapport quarante années auparavant.
Le naufrage ne pouvait avoir été provoqué que par une collision avec un objet à moitié immergé, comme un tronc d’arbre par exemple, qui aurait endommagé le bordé de la drague, provoquant ainsi une brutale et importante rentrée d’eau. Il excluait l’hypothèse selon laquelle les embruns auraient pu remplir progressivement la coque pendant la traversée.